La place du consentement dans le plaisir.

Le consentement sexuel est une notion complexe et floue qui est apparue (tard) dans la deuxième moitié du 20ème siècle dans les pays occidentaux. Mais la loi ne le définit pas clairement ni ne précise comment il devrait se communiquer.

Auparavant, les femmes étaient généralement considérées comme un bien appartenant à un homme : le père puis le mari. La question de leur consentement sexuel ne se posait pas : demande-t-on à une chaise si on peut s’assoir ?

Jusque dans les années 1980-1990, dans le droit canadien notamment, c’est le mari ou le père de la femme violée qui est considéré comme victime. Oui, oui, vous avez bien lu : le père ou le mari est considéré par la loi comme étant la victime !

Dans les années 1980, les législateurs se sont intéressés à la question du consentement en creux, pour définir le viol, déclarant qu’une relation sexuelle était censée être consentie si elle était « acceptée après une décision éclairée qui ne doit pas être prise sous l’effet de la ruse, de la contrainte ou de la menace ». Mais la loi ne dit pas un mot des violences invisibles : l’ensemble des pressions sociales et psycho-émotionnelles pour ne citer qu’elles.

En bref, si la femme est passive, c’est qu’elle est consentante. Pour le droit, céder c’est consentir…. CQFD

Dans ce contexte, quand il y a viol, la charge de la preuve repose sur la victime. On marche sur la tête !

L’entrée tardive dans le Code pénal du viol conjugal (1989 en Belgique) illustre la difficulté de penser l’autonomie des femmes dans un contexte patriarcal, où les femmes ont été longtemps la propriété de leurs maris ou de leur père, donc dénuées d’autonomie.

L’émergence du concept de consentement sexuel est en lien direct avec les droits des femmes. 

Pourtant, en France, en septembre 2021, le juge chargé de l’instruction de l’affaire Darmanin écrit : « Le défaut de consentement ne suffit pas à caractériser le viol. Encore faut-il que le mis en cause ait eu conscience d’imposer un acte sexuel par violence, menace, contrainte ou surprise »

En 2020, toujours en France, un homme accusé de viol déclare « Elle aurait été vraiment claire, je ne l’aurais pas fait mais elle a dit « non je ne veux pas » ».

Et le procès-verbal policier conclut que « L’enquête effectuée n’a pas permis de découvrir d’éléments probants susceptibles de démontrer que le mis en cause aurait pu percevoir le refus d’une relation sexuelle de la part de la victime, rendant ainsi la démonstration d’un viol impossible »

On pourrait continuer longtemps. C’est à pleurer !

Heureusement, grâce à un énorme travail d’associations féminines, les mentalités changent et les lois suivent : les choses avancent dans certains pays :

2018, en Suède : la loi du 1er juillet précise qu’un acte sexuel sans accord explicite est désormais considéré comme un viol, même en l’absence de violence, contrainte, menace ou ruse. C’est une révolution.

2022, Espagne : l’absence de OUI est un NON. 

Le 26 mai 2022, la loi de garantie intégrale de la liberté sexuelle est adoptée par le congrès des députés espagnols. Elle place le consentement au cœur de la définition d’une relation sexuelle : en l’absence d’un consentement libre et explicite, la relation sexuelle est considérée comme un viol. Surnommée « loi du seulement un oui est un oui », cette loi portée par les mouvements féministes et la ministre de l’Égalité, Irène Montero, marque un changement de paradigme important et fait de l’Espagne l’un des pays d’Europe ayant la législation la plus avancée en la matière

« Seul un oui est un oui », « Sans consentement c’est une viol » : ces phrases vous semblent logiques ? Visiblement, ça n’est pas encore clair pour une part importante de la population de notre jolie planète…

Le non consentement

Voyons d’abord ce qu’est le « non-consentement ».

Une personne inconsciente ne peut pas donner son consentement. Ça vous semble évident ? Ce n’est malheureusement pas le cas pour de nombreux hommes, juges ou législateurs. Même certaines femmes se joignent au chœur.

Il est encore utile de rappeler avec insistance que :

  • Quelqu’un qui dort ne peut consentir. 
  • Quand on est ivre ou drogué, il n’y a pas de consentement possible non plus. 
  • Quand il y a une relation de pouvoir, il ne peut y avoir de consentement libre. 
  • Quand il y a insistance, pas de consentement (céder n’est pas consentir. On ne le répétera jamais assez).

Entre insistance et séduction, tout dépend du contexte. Nous en parlerons un autre jour.

Autrefois (vraiment ? il me semble que cette idée reçue est encore très présente aujourd’hui !) on considérait qu’une femme qui disait NON était dans une sorte de jeu de rôles : les femmes étaient censées aimer être forcées (!) et certains hommes aimaient être confrontés à ce qu’ils percevaient comme un défi excitant. Et si elles disaient oui « trop vite », elles étaient taxées de « femmes faciles », « traînées », « nymphomanes »…

Mais pourquoi cède-t-on ? 

  • Pour faire plaisir.
  • Par peur de déplaire, de décevoir, ou d’être rejetée ou quittée, répudiée.
  • Parce qu’on ignore qu’on peut refuser. 
  • Parce qu’on n’ose pas (dire qu’on n’a pas envie). 
  • Parce qu’on ne sait pas comment dire non sans blesser l’autre. 
  • Parce que c’est difficile de dire non.  
  • Et parce que c’est difficile de parler de sexe !!! 

Attention, on peut dire non avec des mots, mais il y a aussi des gestes, des postures, des regards, tout un vocabulaire non verbal pour exprimer un refus ou un accord. 

L’interprétation du non verbal est souvent délicate. Dans le doute, mieux vaut demander un accord clair et explicite. C’est assez facile, il suffit de dire « J’ai l’impression que tu as envie de… Est-ce exact ? » ou simplement « As-tu envie de… ? ». Cela permet de vérifier si on a bien compris. Ce serait dommage de violer sur un malentendu ! Car oui, l’excuse du malentendu ne tiendra bientôt plus, légalement. Autant prendre les devants.

D’ailleurs en Belgique, depuis mars 2022, la loi précise que le consentement ne peut être par défaut, et que l’absence de réaction ne vaut pas consentement… On avance !

Consentir c’est quoi exactement ?

C’est être en adéquation avec ce que l’on ressent, pas seulement avec ce que l’on pense. 

C’est ce sentiment intime, personnel, clair qui doit être communiqué à l’autre.

Pourtant, consentir clairement est encore si difficile aujourd’hui ! 

C’est pourquoi il faut en parler : pour développer les compétences nécessaires pour l’exprimer et le signifier positivement à son/sa partenaire, mais aussi pour le détecter sans ambiguïté chez son/sa partenaire.

C’est donc un sujet qui intéresse autant les hommes que les femmes. Pour le dire autrement, c’est un sujet qui relève à la fois de la personne qui demande et de celle qui l’exprime.

Attention ! Consentir ne vaut que pour l’instant T. L’idée assez répandue qu’il faudrait « signer un contrat avant de baiser » est un non sens !

Un oui n’est pas un engagement. Après avoir dit oui, donc après avoir consenti, on peut dire non à n’importe quel moment. Et si on a dit oui une fois, disons un soir, ça ne nous engage pas pour le lendemain matin, ni pour la prochaine rencontre, ni pour aucun autre moment.

Allons plus loin : consentir à aller boire un verre, ou à aller dîner, ou même à « monter boire un dernier verre » n’est PAS un consentement à avoir un rapport sexuel. Qu’est-ce qui n’est pas clair dans le mot « explicite » ?

En 2022, il reste malheureusement un grand nombre de détracteurs du consentement explicite. Ils arguent souvent du fait que parler pendant qu’on fait l’amour est malvenu. Que les mots font retomber l’excitation. Il est vrai que les rapports sexuels sont généralement davantage associés à des actes physiques que verbaux. Encore une idée reçue à déconstruire !

Et si nous essayions ? Si nous faisions l’expérience de parler plus pendant l’amour ? Nous risquons de découvrir qu’en fait, parler pendant une relation sexuelle (pas tout le temps, ni dire n’importe quoi) est excitant aussi. Cela permet notamment de se sentir en sécurité, donc détendu.e, et donc d’avoir une meilleure érection (tant pour les femmes que pour les hommes).

Comment ?

A ce stade, nous comprenons mieux tout ce qui entre en jeu dans ce fameux consentement et pourquoi il est si important.

Reste à trouver comment le demander ou l’exprimer. Sans faire baisser la température, bien sûr. 

Par un contrat formel ? Bien sûr que non ! Nous avons déjà dit que c’était un non sens.

Alors où trouve-t-on des exemples de conversation réaliste sur le thème du consentement ? Au cinéma ? Dans les séries ? C’est encore bien trop rare.

Dans nos conversations entre copines ? Pourquoi pas ! Chez Sexponentielle, je propose un groupe de parole sur ce thème. Si vous êtes intéressée, contactez-moi.

On peut exprimer son consentement par des mots, des gestes, des regards ou une attitude. Dans un couple établi, c’est plus facile. Avec le temps, on a tendance à connaître le langage corporel de l’autre. Mais ce n’est pas automatique non plus. Ce n’est pas parce que j’ai eu envie d’être pénétrée, de faire une fellation, ou de recevoir un cunnilingus une fois que j’en aurai toujours envie. Le fameux temps T dont nous parlions plus haut.

Interpréter le langage non verbal est difficile.

Un simple regard suffit-il ? 65% des personnes interrogées dans les sondages répondent oui, un simple regard suffit à exprimer et à percevoir un consentement !

Dans un couple établi, un simple regard peut parfois suffire. Mais pas toujours. Il n’est jamais superflu de vérifier si on a bien compris/interprété ce fameux regard.

Pourtant, le consentement ça peut être super sexy et excitant : ça permet de parler de sexe !

Tout est dans le ton et l’atmosphère : légèreté, joyeuseté, respect, attention, bienveillance, tendresse, humour….

Le ton de voix, l’intonation, surtout sont importants : murmurer, se regarder avec tendresse, préciser qu’on a envie mais que ce n’est pas obligatoire ou absolument nécessaire à mon plaisir. Bref, préciser qu’on peut entendre un non. Et rassurer sa/son partenaire qu’on ne l’en aimera pas moins pour autant. 

Petite astuce : On peut parler de tout cela avant d’entamer le gâteau…

Encore une astuce : Évitez de rester dans le flou ! L’imprécision est source de malentendus.

En conclusion, le consentement c’est juste SE PARLER :

  • avant : « Tu as envie ? » « Tu es d’accord ? » (en précisant bien de quoi on parle)
  • et pendant : « Tu aimes ? » « Ça te plaît ? » « Tu as envie ?tu veux que je continue ? » « Plus vite ou plus lentement ? » « Ici ou là ? »…

et SE RESPECTER, S’ECOUTER MUTUELLEMENT. Pour établir une relation de confiance.

C’est si simple… entre personnes de bonne volonté…

Vous souhaitez en savoir plus ? Découvrez le live réalisé avec Valérie Claeys – https://www.youtube.com/watch?v=jesGNqP2Mwk