J’ai longtemps cru que ma vie sexuelle était « normale ». Qu’est-ce que j’entendais par là ? Je ne suis pas tout à fait sûre de le savoir. Ni pire ni meilleure qu’une autre ?

Témoignage anonyme (Sophie, pseudo)

« De temps en temps, j’avais envie de sexe mais j’avais tellement honte de cette envie que je la cachais de toutes mes forces. Je n’osais même pas me l’avouer à moi-même. Alors en parler avec mon amoureux, lui dire ce qui se passait dans mon corps… vous n’y pensez pas !

Parfois l’envie était tellement forte que je me cachais pour me frotter le sexe contre un coussin ou un accoudoir, ou autre chose. Je me donnais du plaisir mais j’étais tellement convaincue que c’était mal, j’avais tellement honte, que je m’efforçais de ne pas y penser. J’ignorais qu’une femme pouvait se masturber. Je croyais que c’était réservé aux hommes. Et que c’était honteux. Même pour eux.
Le mot seul de masturbation me faisait horreur…
La honte, la culpabilité prenaient toute la place.

Souvent, je n’avais pas envie de sexe. Alors je faisais semblant de dormir, espérant que mon immobilité le découragerait. Il aurait été plus simple de dire « tout simplement » que non, pas maintenant, je n’ai pas envie… Impossible. Ces mots ne franchissaient pas mes lèvres. J’avais honte de ne pas avoir envie. Je croyais que mon devoir, en tant que femme, était d’être toujours disponible, d’avoir toujours envie. Que je n’étais pas normale.

Honte d’avoir envie, honte de ne pas avoir envie… Que faire alors ?
Eh bien le plus souvent je cédais. En d’autres mots je me forçais. Ce n’était pas si terrible, pensais-je. Dans les deux sens du mot terrible : pas grave et pas fantastique.
J’ignorais alors que se forcer est grave ! Mon corps me l’a fait savoir par la suite. Et ça a été douloureux. Très douloureux.

De toutes façons, penser au sexe me semblait inutile. Je croyais que le sexe était naturel. Pourquoi y penser ?

J’ai tout essayé : boire un petit verre de vin de plus, regarder des images ou des films, lire des romans érotiques, voire pornos (ça m’excitait et me dégoûtait à la fois). J’ai même essayé de proposer à mon amoureux d’aller ensemble voir un musée de l’érotisme (à l’étranger puisque ça n’existait pas chez nous)… sans succès. Il a eu l’air vaguement étonné et a balayé ma proposition d’un haussement de sourcils peu engageant. Ça ne m’a pas aidée à briser le silence, à engager le dialogue…
J’ai alors acheté un puis des sextoys en cachette, sur internet. Ça, c’était top efficace. Orgasme à tous les coups. Sauf que j’ignorais alors que c’était des orgasmes. Ou je ne me l’avouais pas. Toujours la honte du plaisir solitaire. La norme, croyais-je, était d’avoir du plaisir en couple et par la pénétration.
J’avais bien intériorisé que seule la pénétration était du sexe. Tout le reste était des déviances…

Un jour il m’a fait un cunnilingus. Je ne savais pas ce que c’était. Je ne savais même pas que c’était lié au clitoris. D’ailleurs j’ignorais où était ce fameux clitoris ! Toujours est-il que j’ai ressenti un plaisir comme jamais. Mais comme ce n’était pas la pénétration rituelle, j’ai aussi eu honte de ce plaisir là. J’ai lutté pour ne pas perdre le contrôle. Et quand j’ai eu le courage de lui dire que j’avais aimé ça (au cas où il ne s’en serait pas rendu compte… mais était-il seulement intéressé par mon plaisir ?), il m’a rapidement expliqué que ça lui donnait des maux de tête « à cause de l’acidité ». Fin du dialogue. Fin du plaisir. Retour de la honte et de la culpabilité +++.

Finalement, après une descente aux enfers, une tentative de suicide et un divorce sanglant, j’ai décidé de prendre ma sexualité en mains. De me renseigner. De tenter de reconstruire ma féminité. J’ai cherché et découvert Sexponentielle.
Que dire ? Les mots me manquent. Mes larmes coulent en écrivant ces mots. Ma vie a changé. Pas seulement ma vie sexuelle. Toute ma vie. J’ai retrouvé confiance en moi, en ma féminité. Je sais comment fonctionne mon plaisir, j’ai appris à y penser librement, à en parler avec mon partenaire, à poser mes limites aussi. Juste en allant chercher de l’information. Sans thérapie. »