La grève du sexe : ce qu’elle est… et ce qu’elle n’est pas

On en entend de plus en plus parler : dans les couples, sur les réseaux sociaux, dans les séries et même dans certains mouvements féministes. Mais que recouvre vraiment l’expression “grève du sexe” ? Est-ce une stratégie ? Une vengeance ? Un cri du cœur ? Un rejet de l’autre ? Ou un appel au secours ?

Petite définition rapide

La “grève du sexe” désigne, à première vue, le fait de refuser ou d’arrêter volontairement toute activité sexuelle avec son ou sa partenaire, souvent pour exprimer une colère, une frustration ou une revendication. Le terme est fort, volontairement provocateur. Il évoque une action collective, une revendication sociale, un acte politique.

Mais dans la réalité intime d’un couple, ce qu’on appelle “grève du sexe” recouvre des réalités bien plus complexes. Et c’est là que les malentendus commencent.

Ce que la grève du sexe n’est pas

Ce n’est pas un chantage.

Refuser une relation sexuelle parce qu’on ne se sent pas en sécurité, écoutée, respectée ou aimée n’est pas une forme de manipulation. C’est un signal émotionnel, pas une monnaie d’échange.

Ce n’est pas une punition.

Il ne s’agit pas de “faire payer” à l’autre une erreur ou une faute. Dans la grande majorité des cas, il ne s’agit pas de vengeance, mais de protection.

Ce n’est pas toujours conscient.

Beaucoup de personnes se “déconnectent” de leur désir sans même s’en rendre compte. Le corps se ferme, le cœur se refroidit… et l’envie s’éteint. Ce n’est pas une stratégie. C’est une réaction.

Ce n’est pas définitif.

Ce n’est pas un arrêt total et irréversible de toute vie sexuelle. C’est souvent un temps de pause, un “je ne peux plus continuer comme avant”. Un besoin de remise à plat.

Ce que la grève du sexe peut être

Un cri du corps quand les mots ne suffisent plus.

Quand la communication est rompue, quand les blessures ne sont pas réparées, le corps prend le relais. Il dit : “Stop.” Et ce stop-là mérite d’être écouté.

Un indicateur de désalignement.

Quand l’envie de se connecter physiquement disparaît, c’est souvent qu’un désalignement émotionnel ou relationnel s’est installé. La “grève du sexe” devient un révélateur de ce qui ne va plus.

Un besoin de retrouver sa dignité.

Certaines personnes arrêtent de faire l’amour parce qu’elles ne veulent plus “se forcer”, ou donner leur corps dans une relation où elles ne se sentent pas considérées. C’est une reconquête de soi, pas une fermeture à l’autre.

Une forme de résistance, parfois politique.

Historiquement, certaines femmes ont organisé des grèves du sexe pour protester contre la guerre, les injustices ou les violences. Du Libéria à la Colombie, du Nigeria à la fiction (Lysistrata, d’Aristophane, ou le film Chi-Raq de Spike Lee), le refus du sexe peut devenir un outil de lutte collective.

Et si on changeait de regard ?

Le sexe, ce n’est pas une dette conjugale. Ce n’est pas un dû. Ce n’est pas non plus un “baromètre” de l’amour ou de la qualité d’un couple. C’est une rencontre, qui suppose du désir, du respect, de la liberté et du consentement mutuel.

Quand l’un·e des deux n’a plus envie, ce n’est pas “le problème du sexe”. C’est souvent le symptôme d’un problème plus profond, relationnel, émotionnel, parfois existentiel. La grève du sexe, dans ce sens, est moins un retrait qu’un message : “Je ne veux plus me perdre dans cette relation.”

En résumé…

– La grève du sexe n’est ni un caprice, ni un chantage.

– C’est souvent une mise à distance face à ce qui fait mal.

– Elle peut être un point de départ vers une transformation, si on accepte de l’écouter.

Et si, au lieu de la voir comme une menace, on l’entendait comme une invitation à un dialogue profond ? À se (re)découvrir, à faire évoluer la relation, à créer un espace où le désir pourra, peut-être, refleurir…